Après un gros mois insolent de travail et de projets jusqu’aux oreilles, l’heure est enfin à la décontraction pour ce weekend, et il est temps de nous réconcilier avec un peu de nature et de Thaïlande plus profonde.
Après une grosse heure de trajet en taxi qui nous emmène au terminal des bus à l’extrême ouest de Bangkok, nous voilà donc devant les guichets pour acheter nos billets de voyage.
Céline est de la partie bien évidemment, pour l’une de ses premières expéditions dans le coin.
Disons que notre parcours ne nous emmène pas forcément à l’autre bout du pays puisque le premier trajet est officiellement de 140 km pour 2 heures et demi de route, mais je crois que le dépaysement sera bien plus important que nous le pensions au début.
Le décor se métamorphose doucement mais sûrement avec des rizières bien sûr autour de la double voie et au loin, une belle rangée de montagnes verdoyantes qui apparaît.
On se laisse bercer par le voyage qui nous aura coûté un prix assez dérisoire de 70 bath par personne (1,80 euros!!) :)
Et aux alentours de midi nous voilà enfin aux portes de Kanchanaburi. Petite ville de province, elle ne semble manquer de rien et comme partout en Thaïlande, nous croisons des petits marchés et une vie bien active.
Enfin, au terminus de notre trajet et à la gare routière de la ville, nous admirons un dernier instant les magnifiques bus qui attendent fièrement leur heure pour repartir.
Puis, nous voilà partis à pied en direction de la rivière. On croise bien sûr en chemin des petits commerçants, des gens à vélo, un rythme vivant mais disons-le aussi, un rythme de campagne. Plus paisible et tellement plus agréable.
Peu de voitures pour nous perturber, on se promène sous un soleil bien agréable entrecoupé parfois de pluies rafraichissantes.
Et nous arrivons enfin à la rivière: la fameuse rivière Kwai.
Connue dans le monde entier pour son histoire et entre autre par le film de David Lean qui l’a mise sous les feux des projecteurs. C’est donc ici qu’un épisode dramatique de la seconde guerre mondiale s’est déroulé.
Mais pour bien introduire cette partie de l’histoire, nous décidons d’aller en premier au musée de la guerre : le JEAATH (initiales pour: Japanese, English, Americans, Australians, Thaïs and Holland, qui représentent toutes les nationalités des victimes de cette sombre partie de l’histoire vécue ici).
Ce petit musée est vraiment simple et sans aucune fioriture. Caché dans une cahutte de paille comme l’étaient sans doute toutes les constructions du camp des prisonniers, on est un peu plus plongé dans le vrai et l’authenticité de l’horreur endurée par tous ces hommes à cette époque.
Mais que s’est-il donc passé ici entre 1939 et 1945 ?
Ainsi, les japonais qui avaient entamé un véritable partenariat avec le royaume de Thaïlande, se sont servi du territoire pour y installer leurs bases arrières dont ce camp de prisonniers, suffisamment loin et inaccessible pour les alliés.
Ici, on retrouvait donc tous les soldats de la couronne britannique et leurs alliés américains, qui, au naufrage de leurs navires de guerre, ou à la capitulation lors des durs combats sur les Philippines, l’Indonésie ou Singapour tout proches terminaient entre les mains des féroces nippons.
Ce camp a eu pour image d’être sans pitié pour les faibles, avec des travaux de force à réaliser, difficilement supportable dans cette jungle, chaude et humide, bien loin du monde des Hommes. La jungle étant donc comme une véritable prison naturelle comme en témoigne les photos prises par des officiers Jap. Et la maigreur de ces hommes témoigne de la difficulté de vie sur place.
Puis vint le second grand élément qui a fait la renommée de cet endroit : la construction du pont au-dessus de la rivière Kwaï.
Comme la Thaïlande, la Birmanie, pourtant colonie britannique à ce moment-là, s’allie de l’intérieur aux puissants japonais et la position de ce fameux camp, à quelques kilomètres de la frontière Birmane représente ainsi un axe stratégique fort.
Les japonais décident donc de relier les deux capitales (Rangoon et Bangkok) avec une voie de chemin de fer qui sera dédiée au transport des troupes comme de leur matériel et l’enjambement de cette fameuse rivière sera réalisé par la construction d’un pont par les prisonniers .
Ainsi des milliers d’hommes, ont travaillé durement à la construction de cette voie ferrée de la mort, pour l’ennemi, ce qui coûtera évidemment la vie de nombre d’entre eux et aussi de Thaïlandais embauchés de force pour ce périlleux ouvrage.
Dans l’histoire, un haut gradé de l’armée britannique prendra la tête des travaux, trouvant dans la réalisation de ce pont, la possibilité de redonner de la fierté, de l’honneur et de l’ordre dans ses rangs pour ces hommes oubliés qui ne voient évidemment plus d’échappatoire à cette guerre peut-être perdue.
La construction finit par prendre une bonne tournure devant le délai que leur impose leurs geôliers pour le passage stratégique d’un train. Et finalement, les prisonniers dans leur élan finissent presque par soutenir le projet dans son ensemble, oubliant le rôle que devrait jouer ce pont pour l’empire du soleil levant, avant finalement de se reprendre à temps et de participer avec l’aide des alliés au dynamitage du pont et de son convoi précieux.
Cette page de l’Histoire en fait évidemment un lieu incontournable pour un certain nombre de touristes venus se perdre sur cette partie ouest du pays.
Une fois sortis du petit musée, nous décidons de remonter la ville à pied en longeant évidemment cette rivière aux couleurs "terres". Sur les baies, se trouvent amarrées des espèces de maisons flottantes autour desquelles s’agitent quelques embarcations en bois plus rapides et aux pouvoirs assez impressionnants.
Un peu comme dans "Obélix et Cléopâtre", on voit parfois circuler sur l’eau un de ces minuscules bateaux, traînant deux ou trois lourdes maisons flottantes, dont le style fait penser ( à notre avis !!) à des chalets canadiens .
Enfin bref, il y a de l’agitation ici, et des cars viennent déposer des groupes de thaïs qui s’empressent de monter à bord de ces maisons flottantes pour une virée au cours de l’eau. La classe !!!
Puis, sur notre droite nous finissons par tomber sur l’un des deux cimetières regroupant les prisonniers morts ici : avec 7000 tombes britanniques cela ne peut qu’impressionner quand on sait que cela n’est qu’un échantillon face aux 100 000 morts causées par la construction de la voie de chemin de fer de 425 km de long seulement.
Après s’être arrêtés un instant, nous repartons pour arriver enfin une demi-heure plus tard au pont situé à l’extrémité de la ville. Devant, sous un grand porche, se trouve l’une des locos japonaises qui a du circuler sur la ligne. Puis évidemment avec un peu plus de touristes, nous apprécions le pont qui a été maintes et maintes fois reconstruit. Un petit train reparcourt d’ailleurs plusieurs fois une partie de ce chemin et enjambe donc le pont.
Comme tout le monde ici, on traverse le pont qui, à vrai dire, garde beaucoup de sa rudesse, même pour les touristes qui ne pourront pas s’accrocher à des barrières de sécurité et éviter de se pousser à l’eau en se croisant sur l’étroite voie centrale.
Évidemment ces maladroits contrastent assez avec les quelques ouvriers assis sur les poutres de chaque côté, sans aucune protection, et qui font leur boulot bien sagement. Il y a dans ces images un petit cliché rapporté au Manhattan du début du siècle passé, où des ouvriers soudaient assis à même les poutres des buildings vertigineux.
D’un regard extérieur nous nous disons tout de même que ce pont parait assez petit et il est évidemment difficile de traduire que derrière lui tant de gens ont péri pour le construire.
On jette un dernier coup d’œil enfin, aux montagnes qui enferment au loin le petit bout de région, puis évidemment on se penche au-dessus de l’eau pour apprécier son courant qui emmène les branches arrachées par la crue et bien sûr les petites embarcations locales plus rustiques.
Puis, nous repartons pour la gare routière sur une moto-taxi.
La circulation n’est pas dense et nous apprécions ce mode de transport où nous filons à trois, cheveux au vent sur le dos de la petite mobylette. Le chauffeur nous fera d’ailleurs bien marrer en ne mettant enfin son casque que ... quand la pluie commencera à tomber, puis bien sûr à l’enlever une fois la saucée terminée. C’est vrai que ça protège bien de la pluie, un casque!!!…
Nous, nous montons à bord de notre deuxième bus de la journée. Plus rustique encore et beaucoup plus étonnant aussi, nous ne sommes pas bien nombreux à monter à bord pour ce dernier voyage de fin de journée vers la réserve d’Erawan.
Encore 2 heures de route qui nous emmènent au plus proche des montagnes, le tout dans un coucher de soleil royal qui laisse échapper ses derniers rayons entre les arbres épais qui bordent notre route.
On s’enfonce enfin dans la jungle au fond de la nuit noire puis pénétrons enfin à l’intérieur de la réserve après avoir payé la taxe d’entrée.
Ici, se trouve comme un micro-village, fait de quelques constructions en bambou, en bois et de simples terrasses abritées. Il y a bien évidemment deux ou trois restos qui vendent aussi les indispensables paquets de chips, les bouteilles de soda ou encore les paquets de bonbons même au bout de l’extrême.
On se régale d’un bon riz à l’ananas avant d’aller nous coucher dans un petit bungalow en bambou situé dans la partie reculée du camp. Autour, c’est bien la jungle et tous les bruits de la nuit qui nous entoure font comme une belle mélodie qui, après nous avoir un peu inquiétés, finit par nous bercer puis nous endormir sagement sur nos matelas totalement humides.
Au matin c’est l’extase. Ce petit bout de calme nous dévoile une vue sur les sommets voisins encore dans la brume de l’aube et bien sûr, la végétation luxuriante qui nous entoure.
On reprend nos sacs et c’est parti pour nos nouvelles aventures du jour et nous voilà déjà sur un petit chemin balisé.
C’est que cette réserve a quelque chose de bien particulier à nous dévoiler : de merveilleuses cascades d’eau qui serpentent à l’origine des reliefs environnants.
Nous marchons un peu et tombons déjà sur les premières chutes. Puis deux puis trois.... et c’est la cascade des cascades!! C’est une véritable suite depuis le sommet en fait et les fortes pluies subies la veille comme presque tous les jours à cette période de l’année, font un peu "déborder l’eau du vase", vous imaginez bien!!
C’est d’autant plus impressionnant pour nous.
Ainsi, étant les premiers loustics à entamer l’ascension de cette merveilleuse cascade, les rangers de la réserve nous regardent un peu perplexes sachant la crue occasionnée pendant la nuit, puis finissent par nous accompagner et enfin à nous laisser libre de continuer le chemin tranquilles, une fois le danger à peu près jaugé.
On traverse quelques petits ponts en bois au-dessus de cette eau qui descend à toute allure.
Normalement, quand le rythme de l’eau le permet, les gens s’offrent de petites baignades dans les petites crevasses de la roche. Mais aujourd’hui pour être francs, nous nous contenterons de regarder, et puis nous sommes déjà un peu trempés avec les pluies essuyées depuis la veille.
Nous grimpons, nous grimpons tout en passant sous d’immenses et magnifiques arbres tropicaux, et en appréciant les petits autels religieux enroulés autour de certains troncs. Puis enfin, nous faisons quelques rencontres assez sympathiques pour ne pas déroger à la règle.
Ainsi, une bande de singes semble aller dans la même direction que nous, et nous accompagne en quelque sorte, quelques dizaines de mètres plus haut que nous bien évidemment. Plus sauvages que ceux rencontrés aux abords des grandes villes plus au sud, ceux-là ne sont pas effrayés pour autant et vivent leur vie bien sagement.
Enfin, le sentier se corse car l’eau a littéralement submergé une partie du parcours. Nous grimpons un peu sur les rochers et sommes un peu plus ralentis dans notre élan, mais il en faudrait bien plus pour nous arrêter!!
On se déchausse et on file les jambes à moitié dans l’eau pour passer les obstacles.
Mais arrivés quelques mètres plus haut, on peut dire que le jeu en valait bien la chandelle (je ne comprends vraiment pas cette expression moi !), et les cascades qui n’ont fait que surenchérir leur puissance plus nous montions, sont désormais très impressionnantes.
Un tronc s’est couché au-dessus du cours d’eau rapide et nous apprécions encore une fois cette musique de l’eau qui casse le calme de la nature qui nous environne, et c’est évidemment de « touteu beautéééé ». Quel régal d’être si loin du monde des Hommes!
Enfin, une fois les dernières étapes franchies nous arrivons au pied de la plus grande et dernière cascade d’eau.
Tout droit projetée depuis le sommet, on a le droit a une véritable douche d’eau tiède (on n’est pas dans les Alpes, avec de l’eau frigorifiée! faut pas déconner !!) qui nous trempe et nous lave aussi un peu de notre long et beau parcours.
On reste un bon moment,là, sous ce bruit de tonnerre sans interruption.
Puis, c’est enfin l’heure de redescendre vers notre point d’origine.
En chemin, nous rencontrons quelques touristes très parsemés qui comme nous, tenteront cette belle rando aujourd’hui. Puis, plus bas, ce sont des familles de thaïs qui viennent se poser de manière très conviviale sur les bords du cours d’eau pour partager un bon pique-nique.
C’est très sympathique et cette excursion en pleine nature nous a véritablement revigorés.
Nous revoilà dans le bus qui nous ramènera à Kanchanaburi. Nous sommes comme deux sortes de yétis qui puent, dont les vêtements sont plein de boue et a moitié trempés mais également terriblement heureux de leurs belles découvertes avec un sourire jusqu’aux oreilles. Les chaussettes en mode séchage sur la banquette et en route pour la fin du voyage!!
Enfin de retour pour la dernière étape nous nous précipitons à la gare ferroviaire de la ville, car il n’y a que deux trains par jour, ce qui est pas vraiment très intense comme trafic et nous ne voulons pas louper le dernier (qui est donc le second train si vous avez bien suivi !!).
Mais cela était sans compter sur le formidable réseau ferré thaï. Ainsi, avec nos tickets à la main et nos saucisses toutes chaudes pour le déjeuner dans l’autre, nous attendons sagement sur le bord du quai, et regardons arriver les thaïs un à un. Disons qu’il y a deux catégories de voyageurs :
- les gens comme nous qui pensent naïvement que le train sera à l’heure
- et les gens plus habitués apparemment et qui se pointeront jusqu’à une heure à la bourre.
Vous l’aurez compris, on a pas mal attendu ce foutu train qui aura plus d’une heure vingt de retard!! Mais nous avons tout notre temps et ce denier parcours en valait bien la chandelle.
Ce mode de transport est évidemment très populaire et nous plongeons donc un peu plus dans cette autre Thaïlande qui s’en va en ville pour voir de la famille, commercer, ou retrouver son boulot laissé pour le weekend.
Le train évidemment s’arrête dans toutes les petites bourgades sur le chemin, prenant au passage quelques passagers supplémentaires mais aussi quelques vendeurs de nourriture. Ainsi, au bout de quelques arrêts nous n'avons pas moins d’une dizaine de vendeuses de riz, de rouleaux de printemps, de grillades de poulet, de sucreries et j’en passe, qui déambulent dans le train dans un sens avant de revenir dans l’autre et ainsi de suite jusqu'à l’arrivée. (c’est bien mieux qu’à la SNCF dit donc!!!…)
Enfin évidemment, nous avons une petite pensée pour ces gens qui doivent circuler dans chaque wagon alors que le train sau…sauuuuu…sauutee… Oui, vous avez bien compris, notre train ne tremble pas ou ne secoue pas, il saute tout simplement et de manière assez brusque. Disons presque à chaque fois que le rail change, ce qui en fait un paquet vous vous en doutez bien!!
Enfin moi, j’apprécie bien le dernier petit détail de notre wagon situé en queue de train, avec un simple croisillon qui condamne la porte arrière du train, afin peut-être d’empêcher les voyageurs qui se seraient perdus en sortant des toilettes, de finir tout droit le cul sur les rails!! :)
C’est en tout cas bien pratique pour apprécier une dernière fois ce beau paysage qui se substitue doucement au décor bétonné de la grande ville...
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